L'environnement économique et juridique : Le fonds de commerce et le bail commerçial
1. Le fonds de commerce :
Bien choisir son fonds de commerce est un gage de réussite.
Un bon choix conditionne le chiffre d'affaire de l'entreprise et sa rentabilité. Achat ou location, quelle que soit l'option choisie, il est recommandé d'examiner attentivement les éléments constitutifs du fonds de commerce.
1.1 Les éléments constitutifs du fonds :
Le fonds de commerce est l'ensemble des moyens que l'exploitant a affecté à son entreprise pour pouvoir exercer son activité commerciale en vue de satisfaire et retenir une clientèle.
Il ne faut pas confondre le fonds de commerce avec l'immeuble dans lequel exploité appelé les «murs».
Le fond de commerce comprend des éléments corporels et incorporels. C'est cet ensemble d'éléments qui est acheté et qui doit donc être évalué pour définir prix de cession du fonds.
a. Les éléments corporels :
- Le matériel et l'outillage : meubles corporels servant à l'exploitation du fonds (four, pétrin, véhicule...).
Tout matériel est réputé être aux normes. Leur état, leur qualité, leur vétusté peut entraîner une augmentation ou une diminution du prix demandé.
Le vendeur doit remettre à l'acquéreur les différents procès-verbaux attestant de l'exécution des éventuelles mises en demeure (Inspection du travail, Direction Départementale de la Concurrence et de la Répression des Fraudes, Direction des Services Vétérinaires). Il doit également fournir le dernier rapport de contrôle de l'installation électrique établit par un organisme officiel type Apave ou par un électricien qualifié.
À défaut de mise en conformité, son coût sera déduit du prix de vente.
Par ailleurs, l'acte de vente doit préciser l'âge du four: ce matériel étant le principal élément corporel conditionnant l'exercice de l'activité de boulangerie.
- Le mobilier commercial et les agencements.
- Les marchandises : elles sont destinées à être vendues. Elles comprennent les matières premières, les produits en cours de fabrication et les produits finis.
Généralement, le fonds est évalué sans son stock et celui-ci doit faire l'objet d'une facturation séparée.
b. Les éléments incorporels :
- La clientèle : c'est l'ensemble des personnes qui se fournit habituellement chez un commerçant. Elle est la condition essentielle d'existence d'un fonds de commerce. Elle en constitue la valeur puisque le prix de vente se fixe généralement par référence au chiffre d'affaires.
En boulangerie pâtisserie, un fonds de commerce se vend entre 70% (en zone rurale) et 120% du CA HT moyen des trois dernières années, hors fournitures aux collectivités et tournées.
La loi impose au vendeur de communiquer à l'acheteur les chiffres d'affaires des 3 dernières années en remontant de mois en mois dans le passé à partir de la date de vente.
Ainsi, pour une vente conclue en janvier 2008, le vendeur doit communiquer tous ses chiffres d'affaires du 01/01/2005 au 31/12/2007. ils seront inscrits dans l'acte de vente. Ces chiffres seront appréciés en fonction des conditions d'ouverture.
En effet, le chiffre d'affaires ne peut être bien étudié qu'au regard du nombre de jours travaillés. Il revient donc à l'acheteur de se faire préciser les périodes de congés, les jours de fermeture hebdomadaire ainsi que les horaires d'ouverture (vérifiables avec le brouillard des caisses).
Pour compléter son information, l'acheteur peut demander les facturiers de cette même période afin d'évaluer le chiffre d'affaires réalisé en fournitures (dans le cadre d'un contrat régulier avec une entreprise ou une collectivité).
Par ailleurs, l'acte de vente doit préciser le nombre de quintaux panifiés au cours des 3 dernières années, en distinguant la farine ordinaire des farines spéciales.
- Le nom commercial : c'est le nom sous lequel est exercé le commerce ou la dénomination sociale pour une personne morale.
- L'enseigne : c'est un signe extérieur qui permet l'individualisation d'un fonds.
Nom commercial et enseigne peuvent être identiques. Pour le repreneur, ce qui compte c'est de savoir si le nom sous lequel est connu l'activité est porteur d'une bonne image.
- Les éléments de la propriété industrielle : les brevets d'invention, les marques de fabriques, les dessins et modèles. Leur intérêts est la notoriété qui permet de garantir un certain chiffre d'affaires.
- Les contrats de travail et d'assurances : le repreneur du fonds à l'obligation de reprendre le personnel. Le code du travail garantit au personnel le maintien des droits et obligations prévus par le contrat de travail.
L'acte de vente doit préciser le nom, la fonction, l'ancienneté et les avantages de chaque employé.
- Les autorisations administratives (transport...) et les licences (débit de boissons).
- Le droit au bail : il représente la protection accordée à l'acquéreur du fonds contre le propriétaire des murs. C'est la garantie, pour le repreneur, de bénéficier de la suite du bail de 9 ans en cours lors de l'acquisition ainsi que du droit au renouvellement de ce bail. À défaut de renouvellement, il aura droit à une indemnité d'éviction correspondant à la valeur marchande du fonds plus les frais de déménagement et de réinstallation.
2. Le bail commercial :
Lorsque l'exploitant est locataire des locaux dans lesquels il exerce son activité commerciale, il doit signer avec le propriétaire des lieux un contrat de bail commercial.
Le contrat de bail commercial est un contrat de location par lequel le propriétaire des murs appelé le bailleur met à la disposition d'un locataire commerçant, industriel ou artisan tout ou partie d'un immeuble susceptible de recevoir la clientèle.
La loi relative aux baux commerciaux a comme objectif principal de protéger le fonds de commerce, ce qui est d'une importance fondamentale pour le commerce de détail qui à une clientèle de proximité.
Le commerçant bénéficie du droit d'obtenir le renouvellement du bail ou à défaut une indemnité d'éviction pour compenser la perte de valeur du fonds et réparer son préjudice s'il est obligé de quitter les lieux de l'exploitation.
2.1 Les clauses du bail commercial :
a. Forme et durée du bail.
Si, en théorie, il n'est exigé aucune forme particulière pour valider le bail, il est cependant vivement recommandé de procéder à la rédaction d'un contrat écrit le plus précis possible pour des raisons évidentes d'arbitrage en cas de litige.
Un bail commercial est généralement conclu pour 9 ans.
C'est la durée minimale et elle correspond à ce qui se pratique le plus souvent.
Il est conseillé de ne pas accepter un bail d'une durée supérieure à 9 ans à cause du déplafonnement de loyer qui peut être alors appliqué.
Elle peut être longue, mais dans tous les cas elle ne saurait être d'une durée indéterminée.
b. Objet du bail.
Cette clause du bail définit le type d'activité exercée dans les locaux loués.
Il est impératif d'être très précis dans la description de cette activité car cette clause est à l'origine de nombreux contentieux. Toute activité réalisée différente de celle déclarée dans le bail peut entraîner l'interdiction de poursuivre l'activité voire la résolution du bail. N'hésitez pas à vous faire conseiller.
Ainsi, pour une boulangerie pâtisserie faut-il prévoir l'éventualité d'un élargissement de l'activité et noter comme objet du bail:
-boulangerie pâtisserie confiserie chocolaterie glaces traiteur et boissons «le tout à emporter et/ou à consommer sur place» et alimentation générale.
Dans la perspective d'un développement futur, le raisonnement de prudence s'impose. En faisant préciser un maximum d'activités, même si vous ne les appliquez pas encore, vous assurez à votre commerce des perspectives d'évolution.
Soyez clairvoyant, il est très difficile (et très inconfortable) de renégocier des clauses du bail en cours d'exercice. Dans tous les cas, le recours est alors un accord à l'amiable et vous ne serez pas en position de force pour faire valoir votre demande.
Quant à la voie judiciaire, elle existe, mais comporte beaucoup d'aléas.
c. Révision du loyer.
Le loyer est le plus souvent augmenté tous les trois ans. On parle alors de révision triennale.
Il n'y a révision que si le bailleur a fait connaître sa demande de révision par lettre recommandée, avec accusé de réception, à la date anniversaire.
Les dates sont très importantes, pour deux raisons:
-cette demande n'a pas d'effet rétroactif. Si votre bailleur tarde à vous notifier la révision du loyer, tant mieux pour vous!
-pour être valable, il doit y avoir eu 3 ans révolus de loyers.
Ainsi, pour un bail conclu le 1er octobre de l'année N, la première révision est applicable au 1er octobre N+3. Une demande de révision datée du 29 septembre n'est pas valable.
Renouvellement-loyer plafonné ou indiciaire.
Le calcul du montant de la révision se fait soit sur la base de l'indice trimestriel du coût de la construction soit sur celle du niveau général du prix publiés par l'INSEE (Institut National de la Statistique et des Études Économiques). On parle de loyer plafonné puisque sa détermination est fixée en regard d'un maximum théorique à ne pas dépasser, ce maximum étant la valorisation sur 9 ans des indices INSEE.
Le dépôt de garantie, calculé sur la base du loyer, est également révisé dans les mêmes conditions.
À cause des retards de publication des indices, la révision est estimée puis ajustée quand l'indice est connu.
Renouvellement-loyer déplafonné ou de valeur locative ou de marché.
5 cas autorisent le bailleur à revendiquer un loyer calculé hors indices, c'est-à-dire à la valeur locative. On parle alors de loyer déplafonné ou de loyer de marché.
-1er cas: le bail a 12 ans révolus. Il s'agit d'un bail qui s'est poursuivi par tacite reconduction au-delà de la 9ème année et jusqu'à la 12ème, le bailleur n'ayant pas notifié par huissier le renouvellement de son bail, également par huissier.
En effet, il faut savoir qu'un bail ne prend fin que par une manifestation positive d'une des parties (le congé ou la demande de renouvellement).
-2ème cas: la mono valence. Il s'agit des boulangerie comportant un four construit à cet usage à savoir un four maçonné. Dans ce cas, il n'y a qu'une seule activité possible dans les locaux loués.
Si le four est démontable (cas le plus fréquent aujourd'hui), le local ne doit pas être réputé monovalent.
-3ème cas: les facteurs locaux de commercialité. Ce sont les éléments extérieurs à l'entreprise qui ont participé à l'augmentation de sa valeur commerciale: création d'un arrêt de bus, construction d'un parking voisin...
-4ème cas: modification de la consistance des locaux.
Il s'agit le plus souvent de l'extension de la surface de vente, suite à des travaux.
-5ème cas: l'objet du bail.
C'est la cause la plus fréquente de déplafonnement. Elle est invoquée par le bailleur qui constate un écart entre l'activité décrite dans le bail et celle pratiquée réellement.
En effet, les baux autorisent une activité de boulangerie pâtisserie, parfois avec confiserie et glaces, mais encore trop rarement avec la mention expresse de traiteur et boissons à emporter. Or, l'évolution du métier de boulanger pâtissier conduit de nombreux professionnels à proposer à leur clientèle des produits consommables rapidement le midi type sandwiches, hot-dog, salades... sans parler de certains allant même jusqu'aux plats du jour.
d. Renouvellement du bail.
Le droit au renouvellement est un droit caractéristique du bail commercial.
Le renouvellement se caractérise par la signature d'un nouveau bail dès que l'ancien a pris fin.
Dans le cas où ni le locataire ni le bailleur ne manifestent formellement aucune intention particulière (acte d'huissier avec accusé de réception), l'ancien bail se poursuit tacitement.
Le risque, pour le locataire, est alors de le laisser courir au-delà de 12 ans, délai à partir duquel le loyer est déplafonné.