L’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’Energie (ADEME) a lancé, une campagne pour dire stop au gaspillage alimentaire : il est désormais urgent d’adopter les bons gestes.
Des causes variées
Notre société a évolué, ses codes aussi. Notre façon de nous alimenter et notre rythme de vie ont bien changé. Plus pressé et moins attentif, le consommateur interprète souvent mal les dates de consommation, ne se préoccupe pas de l’organisation de son réfrigérateur. Pire encore, il est sans cesse sollicité par les campagnes promotionnelles des grandes surfaces, souvent mal adaptées à sa consommation personnelle. Mais le consommateur n’est pas le seul fautif. La restauration collective, par exemple, ne prend pas assez en compte les besoins de ses utilisateurs. Trop pleines, les assiettes des cantines finissent régulièrement au fond de la poubelle !
La chasse aux gaspillages
Enjeux éthiques, économiques, sécuritaires, environnementaux … on ne compte plus les conséquences du gaspillage alimentaire. Pour réduire cet impact les gestes du quotidien sont simples. Acheter des quantités adaptées, examiner les dates de péremption, respecter la chaîne du froid, ranger logiquement les aliments au réfrigérateur, le nettoyer régulièrement, cuisiner les restes, pratiquer le compost, préférer les fruits et les légumes de saisons … sont autant de solutions pour réduire les déchets et éviter le gaspillage.
Qui gaspille le plus ?
Ce ne sont pas forcément ceux que l’on croit ! Contrairement aux idées reçues, les restaurants traditionnels perdent et gaspillent beaucoup plus que les cantines, au sein desquelles existent de fortes disparités.
- la restauration commerciale : si la restauration rapide est peu concernée par le gaspillage alimentaire, les restaurants traditionnels et gastronomiques ont les plus grosses pertes, avec 230 grammes de denrées perdues ou gaspillées par personne et par repas. En cause : la difficulté à estimer les commandes en amont et à gérer les stocks, les minima de commandes imposés par certains fournisseurs, les règles strictes de sécurité sanitaire et les manières de cuisiner (déchets).
- la restauration collective (167 grammes par repas et par personne) : les plus grosses pertes se situent chez les patients en court séjour à l’hôpital. La restauration collective des établissements de santé et médico-sociaux est confrontée à différentes difficultés, notamment :
* la grande variété des profils nutritionnels à satisfaire (souvent une trentaine de profils différents),
* le peu de temps pour se restaurer,
* la présentation et la qualité des plats
* les difficultés des patients pour se nourrir.
Côté restauration scolaire, les meilleurs élèves sont les écoles primaires. Au collège et au lycée, on surévalue souvent les quantités à préparer, et on peine à satisfaire des convives aux préférences variées et qui manquent souvent de temps pour déjeuner. Enfin, et contrairement à ce que l’on pourrait penser, les restaurants d’entreprise gaspillent peu (125g par personne et par repas).
La différence entre la restauration et de la distribution alimentaire rend difficile les comparaisons entre ces deux métiers. L’étude révèle que dans la grande distribution, l’importance du gaspillage est directement corrélée à celle du chiffre d’affaires et du nombre de salariés (moyenne : 197 tonnes / établissement /an). Les métiers de bouche gaspillent quant à eux 2,6 tonnes par établissement et par an.
Quelles solutions pour lutter contre le gaspillage alimentaire ?
Elles existent ! Après une sensibilisation accrue de chaque acteur de la chaîne alimentaire, différentes pistes d’actions peuvent être envisagées.
En voici quelques unes :
- SENSIBILISER : dans les cantines scolaires par exemple, des petits gestes peuvent diminuer les pertes. Des rencontres régulières entre les élèves et le personnel de cuisine ont ainsi déjà fait leur preuve. L’affichage chaque semaine, dans la cantine, des volumes de pertes peut aussi provoquer son petit effet ! La sensibilisation des professionnels est également fondamentale, et passe par la formation et l’information, tant des cuisiniers (dans la préparation des plats), que des distributeurs (sur les différences entre DLC et DLUO par exemple).
- PARTAGER LES BONNES PRATIQUES : un peu partout en France des professionnels ont mis en place des actions efficaces de lutte contre le gaspillage alimentaire, et plusieurs études sont en cours pour les identifier et les mutualiser (voir notre article sur la démarche du CCC en Bourgogne). Dans les établissements de santé, une étude va ainsi être menée courant 2012 pour recenser les pratiques vertueuses.
- INCITER À DONNER AUX ASSOCIATIONS : en rassurant les professionnels de l’agro-alimentaire sur les aspects sanitaires, en encourageant distributeurs et industriels à utiliser la Bourse aux dons...
- ADAPTER LA TAILLE DES PORTIONS aux besoins des convives : en proposant deux tailles de plats en restauration traditionnelle, en adaptant la taille des portions en fonction de l’âge des élèves à la cantine, en fonction de l’appétit des patients à l’hôpital... Et pourquoi ne pas systématiser le “doggy bag” dans les restaurants ? C’est devenu pratique courante outre-atlantique, et cela permet de lutter efficacement contre le gaspillage alimentaire.
De nombreuses autres solutions existent.
Le Parlement européen adopte des résolutions antigaspi
Le Parlement européen a adopté début 2012 une résolution demandant des mesures urgentes pour réduire de moitié le gaspillage alimentaire d’ici 2025. La résolution demande également une amélioration de l’accès aux aliments pour les personnes démunies.
« Près de 50 % d’aliments sains sont gaspillés chaque année dans l’Union européenne, par les ménages, les supermarchés, les restaurants et la chaîne alimentaire, alors que 79 millions de citoyens vivent au dessous du seuil de pauvreté et que 16 millions dépendent de l’aide alimentaire d’œuvres de charité, » précise le Parlement européen, qui propose dans cette résolution :
Mieux éduquer pour moins gaspiller
- Une campagne de sensibilisation aux niveaux européens et national.
- La création de cours d’éducation alimentaire (surtout dans les écoles, car c’est dès le plus jeune âge que l’on prend -ou pas- de bonnes habitudes alimentaires).
- La mutualisation des bonnes pratiques.
- Déclarer 2014 « année européenne de lutte contre le gaspillage alimentaire ».
Revoir les emballages et étiquettes
- Créer une "date limite de vente" en plus de la "date limite de consommation" pour éviter que les denrées ne soient proposées dans un délai trop proche de la DLC.
- Proposer plusieurs tailles d’emballages pour que les consommateurs achètent des portions adaptées à leurs besoins.
Encourager la restauration collective responsable
- Promouvoir les produits locaux et la redistribution des invendus aux personnes démunies
- Cibler les programmes de soutien européen en faveur de la consommation de fruits et de lait à l’école (voir l’exemple en France de l’opération Un fruit pour la récré, financée à 50% par l’Union européenne) ainsi que de la distribution de denrées aux personnes défavorisées.
Le gaspillage alimentaire en chiffres
- Gaspillage alimentaire dans l’UE27 : 89 millions de tonnes par an (soit 179 kg par habitant)
- Prévisions pour 2020 (à défaut de mesures) : 126 millions de tonnes (soit une hausse de 40 %)
Origine du gaspillage :
- ménages : 42 % (ici, le gaspillage peut être évité à 60%)
- industrie agroalimentaire : 39 %
- détaillants : 5 %
- secteur de la restauration : 14 %
(Source : Commission européenne)